MUNITIONS : SE PASSER DU PLOMB (première partie)

MUNITIONS : SE PASSER DU PLOMB (première partie)
Le plomb va bientôt se retrouver proscrit des munitions dans tous les cantons. Qu’est-ce que cela changera dans la pratique de la chasse ?
Texte de Francis Grange

 

A plus ou moins brève échéance, nous allons devoir nous passer du plomb pour les cartouches de fusils comme pour les munitions de carabines. Il va nous falloir adopter de nouveaux raisonnements, acquérir de nouveaux comportements… qui deviendront vite tout simplement de nouvelles habitudes. La question est néanmoins vaste. Nous consacrons donc notre rubrique de ce mois aux seules munitions pour carabines et nous traiterons en octobre de celles pour fusils.  

Une idée ancienne

La première balle quasiment sans plomb, l’ABC créée par le balisticien yougoslave Francé Avcin, apparaît en 1965. Elle est fabriquée presque intégralement en alliage à 85 % de cuivre et 15 % de zinc, et n’accueille plus qu’une toute petite quantité de plomb doux dans sa pointe creuse pour en contrôler l’ouverture. L’ABC ne cherche cependant pas à répondre à une quelconque approche écologique, mais uniquement à optimiser son efficacité, en générant une forte expansion de sa tête si l’atteinte se produit dans un organe tendre, associée, grâce à la conservation quasi totale de sa masse, à une pénétration profonde et à la capacité de briser net les plus gros os si l’impact se produit dans une zone dure. Elle y ajoute, toujours en raison de la préservation presque complète de son poids, une diffusion maximale de son énergie. L’apport observé en action de la très novatrice balle ABC, comparativement aux ogives ultra-éprouvées à double noyau en plomb telle la Brenneke TIG de 1912, son évolution TUG de 1936 ou la Nosler Partition de 1948, convainc toutefois peu de chasseurs. L’ABC sombre progressivement dans l’oubli. Il faut attendre le lancement de la Barnes X en 1989, peaufinée depuis en Barnes TSX et TTSX, pour que la construction monométallique en cuivre ou en alliage à forte teneur en cuivre, cette fois sans plus aucune présence même infime de plomb, s’impose vraiment. 

 

 

Une efficacité impressionnante

Il existe aujourd’hui deux types de balles sans plomb, celles à structure monométallique et celles à double noyau en étain. Les ogives monométalliques reprennent le principe initié par la balle ABC, en se dotant désormais, hormis celles dédiées aux portées contenues de la chasse collective, d’un insert terminal en polymère dans leur tête creuse et d’un arrière légèrement resserré dit « boat tail », qui améliorent considérablement leur pénétration dans l’air. Ces perfectionnements leur permettent de rivaliser en conservation de leur vitesse (malgré leur densité moindre : 8,5 à 8,9 contre 10,0 à 10,5) avec leurs homologues à noyau(x) en plomb jusque vers 200 m. La plupart bénéficient également de cotes très régulières qui leur confèrent une haute précision et stimulent leurs performances balistiques. La première balle à double noyau en étain, l’EVO Green de RWS, apparait en 2013 pour répondre à la demande des chasseurs jusqu’alors inconditionnels de l’architecture à double noyau en plomb. L’efficacité à l’impact de ces ogives est analogue à celle des projectiles monométalliques, avec en revanche une densité de seulement 7,6 à 7,8 qui accroît encore leur difficulté à préserver leur vitesse à longue portée, et en conséquence la tension de leur trajectoire. Celles au profil optimisé à l’ultime limite du possible, telles l’EVO Green de RWS ou sa quasi-clone l’Evostrike de Norma, se révèlent toutefois parfaitement efficientes jusqu’à 160-180 m dans l’ensemble des calibres usuels. Elle excluent donc, à l’identique des balles monométalliques, tout regret du plomb, pour le plus vif bonheur des passionnés de grand gibier… tout en contribuant à une nouvelle progression de la chasse dans le respect de la nature et de l’environnement !

 

Adapter l’arme

Le passage d’une balle à noyau(x) en plomb à une ogive exempte de ce métal impose un nouveau réglage de l’arme. Il est très facile à réaliser avec les carabines à un seul canon ou avec les express à ajustement par vis de la convergence des impacts. Ce réglage se révèle en revanche beaucoup plus compliqué avec les express à canons soudés ou avec les armes combinées dotées de plusieurs canons rayés qui nécessitent d’être disjoints, d’agir sur une cale insérée entre eux, puis de les souder de nouveau, cela en s’y reprenant souvent à plusieurs fois. L’opération, longue et requérant le savoir-faire d’un professionnel hautement qualifié, génère un coût élevé, mais elle ne réclame heureusement jamais ensuite d’être renouvelée tant que le chasseur utilise toujours la même munition.

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