LES  CONIFÈRES  ET AUTRES  RÉSINEUX DE  NOS  FORÊTS

LES  CONIFÈRES  ET AUTRES  RÉSINEUX DE  NOS  FORÊTS
« Mon beau sapin, que j’aime ta verdure…» Tels des tableaux hautement colorés,
nos massifs forestiers ressemblent à des patchworks dès l’automne arrivé. Toutefois, une couleur verte, presque sombre, ressort dans certains d’entre eux. Dans cette situation-là, ce sont les conifères qui occupent une place prédominante et durable pendant toute l’année !

Texte et photos d’Alain Rossier

 

Pour bon nombre de personnes, ce vert persistant est imputé aux « sapins », nom qui englobe pour elles tous nos résineux. Or, lorsque l’on se trouve au milieu des forêts jurassiennes, on peut se rendre compte que des différences évidentes caractérisent les deux espèces les plus courantes. L’une s’érige vers le ciel avec une pointe bien marquée, alors que l’autre est un peu arrondie à son sommet ! Ce sont les sapins rouges, épicéa ou Picea abies et les sapins blancs, Abies alba Mill., synonyme Abies pectina. Plus en altitude, le mélèze d’Europe au feuillage caduque, Larix decidua, se pare d’or en automne. Ensuite, nous avons encore la chance d’avoir plusieurs variétés de pins, qui peuvent vivre correctement à plusieurs altitudes. Donc, mis à part le mélèze, tous les autres conifères de chez nous ont un feuillage persistant de différents tons de vert. 

Majoritaire 

Les sapins rouges sont certainement les plus nombreux à l’état naturel dans nos contrées. Dans les forêts jardinées, les recrus sont omniprésents et peuvent assurer la durabilité des sapinières. Certes, des sélections sont parfois faites par des centres forestiers locaux, qui sèment et cultivent des sujets issus des meilleurs reproducteurs. Ils sont ensuite plantés dans des parcelles de rajeunissement et vont croître au milieu d’autres végétaux. Ces plantations seront alors d’excellents couverts pour la faune, en particulier pour le grand gibier, chevreuils, cerfs et sangliers. Plus tard, lorsqu’ils auront atteint une certaine hauteur, la parcelle sera nettoyée et c’est à cet instant qu’il sera nécessaire de protéger les troncs contre les « frayures » des cervidés.
La croissance du sapin rouge est assez rapide lorsque l’environnement est optimal. Les feuilles ou aiguilles d’un vert foncé sont assez denses. Par l’assombrissement nuageux d’avant un orage, les sapins paraissent presque noirs et accentuent le côté lugubre de l’événement qui se prépare ! Ils peuvent atteindre 20 à 35 mètres de hauteur et ont une forme conique bien reconnaissable. Les fûts deviennent longs, bien droits et sont très recherchés pour les bois de construction. Le débardage est toujours très spectaculaire, tout comme le transport lorsque les troncs ne sont pas sectionnés ! Le sapin rouge donne des pives en forme de cônes retombants, de couleur brune, qui s’amoncellent sur le sol parmi les aiguilles tombées. Cela donne un excellent « terreau » après oxydation.

Accent du sud

Le sapin blanc est plus méridional, il habite les montagnes du centre et du sud de l’Europe. Il est omniprésent sur les pentes du Jura et moins répandu dans les Alpes, où il n’occupe que les étages inférieurs. Il est très souvent isolé et ne forme que rarement une forêt à lui seul. Le sapin blanc peut devenir un géant de 50 mètres de hauteur. Des sujets imposants impressionnent le randonneur qui peut, parfois en plein pâturage jurassien, profiter d’un bon repos ombragé. Le bétail y trouve également son compte pendant l’estive et il n’est pas rare que le gibier s’y arrête également. Les aiguilles du sapin blanc sont longues de 2 à 3 centimètres, elles sont d’un vert foncé et marquées de deux lignes blanches en dessous. Elles sont disposées à plat, sur deux rangs, de chaque côté des rameaux. Les cônes se dressent verticalement sur les jeunes branches qui les portent. A maturité, les écailles tombent avec la graine, alors que l’axe qui les a portés reste en place. Les troncs ont une écorce assez claire et le bois est blanc. On extrait des jeunes arbres la « térébenthine de Strasbourg », appelée colophane. Les violonistes enduisent leurs archets d’un résidu de cette térébenthine distillée. On trouve différentes races géographiques de l’Abies pectina et aussi d’autres variétés comme les sapins de Céphalonie, de Cilicie ou le sapin concolore. L’Abies nordmaniana, originaire des montagnes du nord de l’Asie Mineure et certaines parties du Caucase, a été introduit dans les cultures européennes en 1848. C’est un bel arbre qui peut atteindre 20 à 30 mètres de hauteur. Jeune, il est très beau, harmonieux et pyramidal, portant un feuillage dense d’un vert très foncé. Sa culture est facile et c’est pourquoi il est devenu le « sapin de Noël » préféré de la population. Toutes ces espèces offrent donc un feuillage persistant.

Couleurs d’automne 

Pour se distinguer des autres résineux, les mélèzes ont un feuillage caduc et font partie de la famille des pinacées. S’ils sont fréquemment présents en Europe, les mélèzes habitent aussi l’Asie, en Chine méridionale, dans l’Himalaya. Le mélèze d’Europe, Larix decidua Mill., a un feuillage assez aéré, des petites aiguilles de couleur vert tendre. Tous les chasseurs de montagne en ont retrouvé dans leur chemise en rentrant de leurs affûts ou approches. S’il évite le Jura, craignant les terrains calcaires, il est partout dans les Alpes et croît jusqu’à plus de 2000 mètres. Il peut atteindre 25 à 36 mètres de hauteur. Le tronc est droit et l’écorce crevassée est brun grisâtre. La délicatesse et la finesse de ses feuilles étroites lui permettent de mieux supporter la sécheresse et les frimas de chez nous. Les fleurs apparaissent en forme de petits épis violets accompagnés des fleurs mâles jaune pâle, en même temps que les feuilles, et cela lui donne un charme particulier. Elles donnent ensuite des petits cônes caractéristiques, qui mûrissent à l’automne et persistent longtemps sur l’arbre. C’est à cette saison que le feuillage prend une magnifique couleur jaune or intense. Le bois du mélèze est de haute qualité pour l’ébénisterie et la construction de chalets. Le mélèze du Japon, Laris leptolepis, est une plante exotique, il pousse rapidement et résiste bien à la pollution. Sensible aux gelées, sa vie est de courte durée, mais il est intéressant pour la décoration.

Facile à vivre

Les pins sont peut-être les conifères les plus importants du règne végétal et comptent quelque quatre-vingts espèces par le monde. On les trouve surtout dans les régions tempérées ou froides. Pour leur détermination, une des plus simples consiste à compter le nombre de feuilles contenues dans chaque gaine. Les pins s’accommodent facilement de presque tous les climats et résistent très bien aux vents. Ils peuplent souvent des terrains perdus pour l’agriculture, mais ne supportent pas bien la présence des feuillus. Cette facilité à croître un peu partout en fait une espèce intéressante à plusieurs titres. Le pin sylvestre, Pinus sylvestris, est la variété la plus commune que l’on rencontre dans toute l’Europe. En Suisse, il est un peu moins élevé que dans le reste des régions européennes et sa hauteur moyenne varie entre 20 et 25 mètres. Dans d’autres pays, il peut atteindre les 40 mètres ! L’écorce est grise, plus ou moins foncée. Ses couches intérieures réduites en poudre servaient anciennement de nourriture pour les porcs ! Les feuilles groupées par deux sont droites et un peu piquantes. Les cônes sont longs de 3 à 10 centimètres, souvent réunis par deux et de couleur brune à maturité. Le pin cembro, Pinus cembra, est l’arolle de nos régions alpines. S’il côtoie les sapins et les mélèzes, il se retrouve seul si l’altitude culmine au-dessus de 2000 mètres. Subissant les affres du temps et des grands frimas hivernaux, des sujets âgés deviennent rabougris et tourmentés dans leurs formes. Il dépasse rarement 10 à 20 mètres. L’écorce reste lisse longtemps et se gerce avec l’âge. Les feuilles sont groupées par cinq dans la gaine et c’est ce qui caractérise le plus cette espèce. Les cônes sont oblongs et dressés, de couleur d’abord violacée et devenant brun clair à maturité. Les graines sont bonnes à manger et rappellent les pignes du pin pignon. Elles étaient ramassées anciennement pour les manger ou les vendre. Il est certain qu’elles profitent aussi à certains animaux et aux oiseaux. Le cassenoix en fait un festin, mais il propage aussi l’espèce en enterrant les graines en prévision des disettes de la mauvaise saison. Les graines qu’il ne retrouve pas peuvent ainsi germer après la fonte des neiges !
 

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