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ABROUTISSEMENT DU RAJEUNISSEMENT FORESTIER PAR LES ONGULÉS

ABROUTISSEMENT DU RAJEUNISSEMENT FORESTIER PAR LES ONGULÉS
Cerfs, chevreuils, chamois et bouquetins se nourrissent notamment des bourgeons, pousses et feuilles de buissons et d’arbres. Il s’agit de l’abroutissement qui influence le rajeunissement forestier et son développement.

Texte : Dr Andrea D. Kupferschmid, photos WSL

L’abroutissement de la pousse terminale des arbres entraîne une perte de sa croissance en hauteur et, pour les plus jeunes plants, une mortalité accrue. Chevreuil, cerfs et chamois choisissent de façon sélective parmi les différentes essences leur source d’alimentation. La vitesse et l’efficience de la réaction de l’arbre à l’abroutissement, par exemple en formant des pousses latérales qui vont prendre en charge la croissance apicale, varie d’une essence à l’autre.

Les ongulés vont ainsi influencer la croissance de chacune des différentes essences de façon particulière. Cela peut avoir un fort impact sur la présence de certaines d’entre elles, parfois aller même jusqu’à leur disparition alors que ces essences sont parfaitement en station. Un abroutissement répété influence aussi bien le mélange que la structure de la forêt du futur.

Tous les étages concernés

À l’étage collinéen, le chevreuil abroutit préférentiellement le chêne, mais aussi d’autres essences feuillues comme l’orme et le frêne.

À l’étage montagnard, chevreuils, cerfs et chamois abroutissent volontiers le sapin blanc, les différents érables, le hêtre et l’épicéa. 

À l’étage subalpin inférieur, chamois et cerfs n’hésitent pas à abroutir et porter l’estocade1 à l’érable sycomore, au sorbier des oiseleurs et à l’arolle. Sur cette dernière essence, plus haut, à la limite altitudinale forestière, ils sont rejoints parfois par le bouquetin.

Des essences rares, telles que l’if et l’orme, sont souvent abrouties dès le stade de semis par la faune ongulée sauvage. Les plantations d’essences exotiques (douglas, chêne rouge, sapin des montagnes) sont particulièrement appréciées et n’ont aucune perspective de développement sans protection particulière. Des essais d’afforestation avec des essences exotiques menées par le WSL dans les années 1985 l’ont clairement montré.

 

Forte pression 

L’abroutissement par les ongulés sauvages peut conduire à terme à la transformation de la composition naturelle des espèces d’une forêt, dans le sens où les essences appréciées par les ongulés disparaissent petit à petit au profit des essences rarement abrouties ou plus tolérantes à l’abroutissement, qui vont alors devenir dominantes.

Un ralentissement de la croissance du rajeunissement peut aussi être observé, ce qui n’est pas tolérable dans les forêts à fonction de protection prioritaire et les reboisements de tels sites après événement particulier (tempête, incendie).

On peut encore constater une diminution du nombre de tiges et de leur qualité (p. ex. fourches, troncs multiples, maladies fongiques), ce qui, en montagne, réduit l’effet protecteur de la forêt.

En forêt de montagne tout particulièrement, la croissance des jeunes arbres est lente. Leur pousse terminale est ainsi à la merci de la dent du chevreuil, du cerf et du chamois durant une beaucoup plus longue période que si ces arbres bénéficiaient de conditions de station idéales avec un fort accroissement. En altitude, le sapin a par exemple souvent besoin de deux ans avant de former à nouveau une vraie pousse terminale. Selon le manuel de l’OFEV Biodiversité en forêt: objectifs et mesures. Aide à l’exécution pour la conservation de la diversité biologique dans la forêt suisse, la perte du mélange des essences causée par l’abroutissement du gibier fait partie des principaux problèmes de la forêt de montagne.

Tout abroutissement n’a cependant pas la même influence sur chaque arbre en tant qu’individu ni sur le rajeunissement en général. Si, au sein d’un rajeunissement suffisant, voire abondant, dans des conditions de station qui permettent une bonne croissance, une partie des bourgeons terminaux est abroutie durant une période limitée, cela n’aura pas forcément de conséquence.

Ecorçage 

Outre abroutir les jeunes arbres, les ongulés sauvages peuvent aussi les écorcer, les frayer et les achever jusqu’au-delà du stade du perchis. L’écorçage correspond à l’arrachage de l’écorce avec les dents, il est souvent concentré sur une certaine surface boisée. Il est pratiqué pour l’essentiel par le cerf sur des essences avec une fine écorce. La frayure est le frottement des bois du cerf et du chevreuil contre un tronc pour éliminer le velours qui les recouvre.

Souvent, les arbres frayés, soumis à l’estocade ou frottés par le cerf et le chevreuil sont des arbres marquants et isolés. Les arbres plantés sont particulièrement appréciés ou les essences avec une forte teneur en huiles essentielles et à résine aromatique (p. ex. douglas, mélèze, pin, sureau, merisier et les essences exotiques). Ecorçage et frayure, quand ils ne sont pas mortels en soi, favorisent des infections fongiques, cause importante de mortalité de l’arbre.

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