LES CHIENS DE CHASSE AU SERVICE DE LA COLLECTIVITE

LES CHIENS DE CHASSE AU SERVICE DE LA COLLECTIVITE
Le Service de la consommation et des affaires vétérinaires (SCAV) du canton du Jura va collaborer avec la Fédération cantonale jurassienne des chasseurs (FCJC) dans le cadre du groupe dintervention en cas d’épizootie hautement contagieuses, dans l’éventualité où des cas de peste porcine africaine (PPA) devaient être décelés sur le territoire cantonal.

Texte et photos de Jérémie Cortat, chargé de projet au SCAV JU

Depuis plusieurs mois, le spectre de la peste porcine africaine (PPA) plane sur l’Europe occidentale. Cette épizootie, qui s’est propagée depuis la Géorgie en 2007, s’étend désormais en Europe occidentale avec la présence de foyers de contagion en Allemagne et en Italie, ainsi que dans de nombreux autres pays d’Europe de l’Est. La Suisse est ainsi prise en étau, et les Services des affaires vétérinaires cantonaux se préparent à affronter une potentielle apparition soudaine de peste porcine africaine sur leur territoire.

Faible contagiosité, létalité extrême

Cette maladie, qui n’est pas transmissible à l’homme, est causée par un virus qui touche exclusivement la famille des suidés. Sous nos latitudes, les espèces menacées sont les sangliers et les porcs domestiques. Ce virus se caractérise par une faible contagiosité – c’est-à-dire qu’un individu infecté doit être en contact rapproché avec un individu sain pour lui transmettre la maladie. Cependant, il est d’une létalité extrême pour les animaux infectés car moins de 10 % d’entre eux survivent.

Contrairement à la tristement célèbre peste noire, qui a décimé les populations du XIVe siècle, qui était due à la bactérie Yersinia pestis, la PPA est causée par un virus. Cette maladie a hérité du qualificatif de « peste » à cause de la violence de ses symptômes : fortes fièvres, saignements au niveau de l’épiderme, coloration violacée aux oreilles et sur d’autres parties du corps, qui se soldent généralement par une mort subite. Malheureusement, à l’heure actuelle, il n’existe ni traitement ni vaccin contre cette maladie dévastatrice. 

Ce virus a la particularité d’être extrêmement résistant et peut notamment se transmettre par les fluides corporels de l’animal tels que le sang, l’urine, ainsi que la salive. De plus, même après la mort de l’animal, le virus demeure actif dans la chair de ce dernier pendant plusieurs mois si la viande n’est pas cuite . Ainsi, les préparations carnées insuffisamment cuites, séchées ou encore crues constituent un facteur de transmissibilité important si elles sont ingérées par des suidés. 

Limiter les risques

De ce fait, consécutivement à la contamination de certaines exploitations porcines au nord de l’Italie, il n’est pas exclu que le virus puisse être présent dans des morceaux de viande de porc en provenance de ce pays. L’apparition du virus en Italie résulte d’ailleurs très probablement de restes de viande crue de porcs contaminés jetés dans la nature.

Par conséquent, afin de limiter le risque lié à la transmissibilité inhérente à la potentielle présence de virus dans la viande, une campagne de prévention a été mise sur pied au niveau fédéral par l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) en partenariat avec les Services des affaires vétérinaires des cantons et les communes. Des affiches sur les lieux de pique-nique rappellent à la population de ne pas jeter leurs déchets carnés dans la nature.

Néanmoins, si malgré toutes les mesures de prévention prises, un foyer de PPA devait quand même être détecté sur le territoire cantonal, le groupe d’intervention en cas d’épizooties hautement contagieuses serait déclenché. 

Garantir les mesures de biosécurité

Les directives pour lutter efficacement contre une épizootie véhiculée par des animaux sauvages prescrivent une segmentation d’une zone géographique en trois zones distinctes séparées par des clôtures, respectivement : une zone infectée, une zone tampon et une zone propre. La zone infectée correspond au compartiment de terrain dans lequel sont confinés les animaux malades, la zone saine correspond au reste du monde qui est exempt de la maladie, et la zone tampon se situe entre les deux zones précitées.

Dans la zone infectée, l’objectif est de laisser circuler la maladie jusqu’à ce que toute la population de sangliers infectés soit éradiquée. La zone tampon revêt quant à elle une importance primordiale car c’est dans cette dernière que des recherches minutieuses sont menées pour vérifier l’imperméabilité du dispositif de quarantaine de la zone infectée. De plus, par mesure de précaution, les populations de sangliers dans la zone tampon doivent être limitées même si elles sont saines. Cette mesure peut paraître contradictoire. Cependant, l’objectif central de la lutte contre la PPA n’est pas de protéger les sangliers, mais l’économie qui gravite autour de la viande de porc.

Chaque cadavre de sanglier infecté gisant dans la nature constitue une source de contamination importante, c’est pourquoi il est primordial que les carcasses puissent être rapidement identifiées et éliminées en garantissant toutes les mesures de biosécurité nécessaires. Cependant, le défi est double, car non seulement les zones géographiques peuvent être relativement vastes, mais ces animaux excellent en outre dans l’art du camouflage et peuvent se cacher dans des emplacements extrêmement difficiles d’accès surtout lorsqu’ils sont malades.

Chiens de chasse à la rescousse

Les moyens usuels pour la recherche de cadavres de sangliers sont : les battues humaines, les chiens ainsi que l’utilisation de drones à imagerie thermique. Les autorités allemandes qui ont déjà une solide expérience en matière de lutte contre la PPA ont misé essentiellement sur l’emploi de chiens. Selon eux, grâce à son odorat, un seul chien est autant efficace que huitante personnes.

L’hégémonie de la race canine été confirmée lors d’un exercice, organisé par le Service de la consommation et des affaires vétérinaires du canton de Neuchâtel, lors duquel cinq carcasses de sangliers ont été disposées aléatoirement dans une forêt couvrant une surface de plusieurs kilomètres carrés. L’exercice consistait d’une part à trouver les sangliers et d’autre part à éliminer les carcasses en respectant toutes les mesures de biosécurité. Des chiens étaient en concurrence avec des pionniers de la protection civile qui effectuaient des battues. Le résultat est cinglant : cinq carcasses retrouvées par le meilleur ami de l’homme et aucune par l’homme !

Fort de ce retour d’expérience, le Service des affaires vétérinaires du canton du Jura veut miser sur la composante canine, car c’est elle qui offre la plus grande adaptabilité et surtout le meilleur taux de réussite. Les autres moyens tels que la battue humaine et l’engagement de drones demeureront des moyens complémentaires engageables au cas par cas. 

Collaboration avec le monde de la chasse

Ainsi, à l’instar de nos voisins neuchâtelois, le Service de la consommation et des affaires vétérinaire (SCAV) va collaborer avec les spécialistes du monde de la chasse afin que ces derniers puissent prêter main-forte en cas d’épizootie. Ainsi les chasseurs, au travers de leur savoir-faire spécifique, pourront aider d’une part à rechercher activement des cadavres de sangliers avec leurs chiens, mais également à mener des actions de dépopulation de sangliers dans les zones à proximité des éventuels foyers de contamination.

Les premiers jalons de cette fructueuse collaboration entre la FCJC, le SCAV et l’Office de l’environnement ont été posés au mois de juin 2025. Le SCAV et l’Office de l’environnement sont reconnaissants envers la FCJC de mettre son savoir-faire unique au monde de la chasse au service de la collectivité dans le cadre de la lutte contre la PPA. 

Laisser une réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Catégories